Chroniques au long cours by Chroniques au long cours

Auteur:Chroniques au long cours [cours, Chroniques au long]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Arthaud
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Les deux expériences suivantes furent bien différentes : bonne expérience, budget confortable, programme de course en solitaire autour du monde. Tout a commencé par de la philosophie dans un cabinet d’architectes. En fonction d’une étude météo précise, déterminer les points clés du parcours où se fera la différence avec les concurrents, préciser mes points forts, mes faiblesses. Ainsi, pour suppléer à une moindre force physique, nous avons décidé d’adapter le principe de la quille pivotante à un 60 pieds, imaginé de mettre un hublot sur le tableau arrière à côté du rangement du bib[1] pour qu’il soit possible de sortir du bateau retourné (bien m’en a pris puisque cela m’est arrivé !). Chaque innovation était ensuite estimée par un prix au kilo et au dixième de nœud gagné pour se concentrer sur le plus rentable. La réalisation d’une grande unité, forcément déléguée à un chantier, implique aussi beaucoup de suivi, de planification et d’orchestration de nombreux corps de métiers. Construire à l’unité est une affaire d’artisanat d’art, et des artistes ne sont pas toujours faciles à manager. Combien de fois a-t-il fallu calmer un chantier pestant contre des plans en retard ? Combien de pièces repartant à l’atelier car pas exactement conformes ? Combien de plannings refaits pour cause de livraison tardive ? Il faut aussi arbitrer en permanence entre les solutions proposées par chacun, sûr de son procédé, essayer d’écouter les propositions sans laisser chacun considérer le projet comme un terrain d’expérience. Au final, c’est bien moi qui vais naviguer et assumer !

Tout cela demande du temps ou des moyens pour appointer un chef de projet compétent. Ma dernière expérience en date fut d’une autre nature : budget moyen, programme de navigation dans les glaces réclamant une grande autonomie et une belle robustesse, manœuvre à équipage réduit mais capacité d’accueillir des non-marins (écrivains, alpinistes, plongeurs, cameramen…). Après avoir longuement consulté, la meilleure solution fut l’achat d’occasion ! Car il n’est pas toujours nécessaire de réinventer le fil à couper le beurre. Moyennant quelques modifications, les unités d’occasion seront souvent moins chères et plus immédiatement disponibles.

À tous les candidats à la construction, je redonnerais au final qu’un conseil : naviguez ! Naviguez encore ! Sur tout ce qui flotte ; visitez systématiquement les voisins de mouillage, faites-vous expliquer les trucs et astuces (les propriétaires seront toujours émus et fiers de votre intérêt). Notez, faites des croquis, courez les Salons nautiques et les sites Internet d’échanges de conseils. Bref, fouinez pour vous faire votre propre idée. Et soyez surtout bien sûr que, dès que votre fier navire sera à l’eau, vous trouverez déjà mille améliorations et modifications, de quoi occuper vos escales. Mais ça, c’est une autre histoire.

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